L'analgésie locorégionale et post-opératoire
Pompe à morphine Autocontrolée (ACP)
Analgésie loco-régionale (Cathéter para-vertébral)
Pompe à morphine Auto Contrôlée par le Patient (ACP) en Intra Veineux (IV)
La douleur post-opératoire est une des principales raisons de l’appréhension des patients devant bénéficier d’une intervention chirurgicale. Elle est souvent caractérisée par une forte intensité évoluant toutefois le plus souvent sur une durée brève (2-3 jours).
La morphine reste aujourd’hui le traitement anti-douleur (antalgique) de base après un grand nombre d’opérations. Elle s’administre soit de manière discontinue (injections répétées en sous-cutané) par l’infirmière, soit sur le mode Auto Contrôlé par le Patient (ACP) en Intra Veineux (IV).
Qu’est-ce qu’une pompe ACP IV ?
Pompe ACP IV
C’est un pousse-seringue contrôlé par un micro-ordinateur et commandé par la patiente par un bouton-pressoir. Elle est connectée sur la voie intraveineuse (perfusion) de la patiente. Sa programmation, prescrite par le médecin anesthésiste, permet de définir la dose (bolus) d’antalgique délivrée lors de la demande (poussée sur le bouton-pressoir) ainsi que la période réfractaire (période pendant laquellela patiente ne peut recevoir aucune injection supplémentaire d’antalgique même s’elle appuie sur le bouton-poussoir).
Quel est le principe de l’ACP IV à la morphine ?
Quand la patiente est douloureuse, elle s’administre elle-même, sans l’intervention de l’infirmière, un bolus de morphine. Elle répète cette opération jusqu’à l’obtention d’un confort suffisant. La patiente peut ainsi adapter immédiatement la dose de morphine à ses besoins, limitant ainsi les périodes de surdosage ou de sous dosage.
L’ACP fonctionne donc selon une boucle fermée où la patiente contrôle activement sa douleur avec toutefois des limites de sécurité (dose et période réfractaire) définies par le médecin prescripteur.
Quelle est l’efficacité de l’ACP IV à la morphine ?
Comparée aux méthodes classiques d’administration, elle permet une analgésie plus adaptée en fonction de l’intensité de la douleur ressentie et de la sensibilité de chaque patiente à cette douleur mais également aux effets de la morphine. L’administration par voie intraveineuse assure une efficacité rapide (élévation quasi instantanée de la concentration sanguine en morphine) tout en réduisant les doses totales nécessaires et les effets secondaires (nausées, vomissements, sédation,…). Elle rend la patiente moins dépendante du personnel infirmier pour son traitement antalgique.
Quelles sont les indications de l’ACP IV à la morphine en chirurgie gynécologique ?
Si tout type de chirurgie peut en théorie en bénéficier, l’ACP IV à la morphine est cependant le plus souvent réservée aux interventions sources de douleurs postopératoires importantes. Il s’agit essentiellement de l’ablation de l’utérus (hystérectomie) par voie abdominale (laparotomie), de la cure d’incontinence urinaire (promontofixation) par voie abdominale (laparotomie) et de certaines interventions majeures sur le sein (mammectomie avec curage axillaire et/ou reconstruction).
Quelles sont les contre-indications de l’ACP IV à la morphine ?
L’utilisation de cette technique est contre-indiquée en cas de refus de la patiente, d’incompréhension de la technique ou d’incapacité à utiliser le matériel, de toxicomanie et d’allergie ou d’intolérance à la morphine.
Quels sont les effets secondaires de l’ACP IV à la morphine ?
Pour autant que le mode de fonctionnement de la pompe (utilisation uniquement par la patiente) soit respecté, la dépression (fréquence respiratoire < 10/min) ou l’arrêt respiratoire est exceptionnel. En effet, en cas de surdosage débutant (concentration sanguine excessive) en morphine, une sédation (somnolence) apparait ce qui prévient l’injection de bolus complémentaires par la patiente. La concentration sanguine ne peut alors atteindre le seuil nécessaire pour voir se développer une atteinte respiratoire.
Les nausées et/ou vomissements ne sont pas rares. Leur fréquence est favorisée par la dose totale de morphine administrée. Elle dépend également d’une sensibilité individuelle aux effets émétisants de la morphine. En cas de survenue, différents médicaments d’une grande efficacité (ondansetron, dropéridol,..) sont aujourd’hui disponibles. Leur administration solutionne le problème dans la toute grande majorité des cas.
Lors de sa consultation préopératoire, le médecin anesthésiste interrogera la patiente sur son éventuelle sensibilité aux effets émétisants de la morphine. En cas de réponse positive, il élaborera une stratégie spécifique de prise en charge débutant durant l’anesthésie (administration de dexaméthasone, dropéridol et/ou ondansétron, maintien de l’anesthésie par propofol IV,…) et se poursuivant en postopératoire. Sans l’éliminer, celle-ci permet de réduire le risque de manière très significative.
La rétention urinaire (difficulté à uriner) est rarement un problème en chirurgie gynécologique. En effet, lors des interventions pour lesquelles l’ACP IV à la morphine est utilisée, une sonde vésicale est très généralement mise en place durant les 2-3 premiers jours postopératoires.
Le prurit (démangeaisons) est très rarement important. L’administration d’un anti histaminique résout la plupart des cas.
Le risque de toxicomanie est inexistant. La dépendance à la morphine ne se développe qu’en cas d’administration prolongée. Or, la durée d’utilisation de l’ACP IV à la morphine est limitée aux 48-72 premières heures postopératoires.
Par contre, la prise de morphine peut s’accompagner d’un certain degré d’euphorie (« la vie est belle ») et beaucoup plus rarement d’hallucinations visuelles.
Quelles sont les modalités pratiques d’utilisation de l’ACP IV à la morphine ?
La sélection des patientes est réalisée lors de la consultation préopératoire d’anesthésie. Le médecin anesthésiste informe la patiente des avantages, inconvénients, effets indésirables et modalités de surveillance de l’ACP IV. Il lui présente les techniques antalgiques alternatives. Le choix de la patiente est consigné dans son dossier et est confirmé lors de la visite préopératoire la veille de l’intervention.
La mise en route de la technique est réalisée en salle de réveil (SSPI) par l’infirmière surveillant la patiente. Son objectif est d’atteindre rapidement une concentration sanguine efficace (analgésique) en morphine. Pour ce faire, une titration initiale (administration par voie intraveineuse de petites doses (2-3 mg) répétées (toutes les 5-10 minutes)) de morphine est pratiquée jusqu’à ce que la patiente soit soulagée. Ensuite, l’ACP IV est connectée à la voie veineuse et son fonctionnement réexpliqué à la patiente.
La durée d’administration est le plus souvent limitée aux 48-72 premières heures après l’opération. Exceptionnellement, elle pourra être prolongée par le médecin anesthésiste en cas de douleurs intenses persistantes.
La surveillance de la patiente sera en tout point comparable à celle des patientes sans ACP IV. L’infirmière d’hospitalisation évaluera régulièrement (au minimum toutes les 4 h) les paramètres vitaux (fréquence cardiaque, tension artérielle, température, fréquence respiratoire, degré de somnolence,…), le niveau de douleur (à l’aide d’une échelle d’évaluation spécifique) au repos et à la mobilisation, les paramètres de la pompe (doses de morphine reçues, nombre de demandes,…) et les éventuels effets secondaires. En cas d’analgésie insuffisante (douleur incomplètement soulagée), elle encouragera la patiente à utiliser davantage sa pompe ACP (en début de traitement, la patiente a très souvent peur de trop l’utiliser) et lui administrera des antalgiques complémentaires non morphiniques (paracétamol, anti-inflammatoire, tramadol) prescrits par le médecin anesthésiste.
L'arrêt de la pompe ACP IV est simple et indolore (simple déconnection de la voie veineuse). Lors de cet arrêt, un traitement antalgique de relais (paracétamol, anti inflammatoire, tramadol, morphine sous-cutanée) est systématiquement prescrit par le médecin anesthésiste et administré, à la demande de la patiente, par l’infirmière d’hospitalisation.
Auteur: Dr François SINGELYN Médecin anesthésiste réanimateur
Mise en page: 17 Juillet, 2012
Mise à jour:
15 Août, 2015
Analgésie loco-régionale: Cathéter périvertébral pour les mastectomies ou reconstructions mammaires
Le traitement actif de la douleur postopératoire est un des objectifs importants dans la chirurgie majeure du sein comme la mastectomie ou la chirurgie de reconstruction mammaire.
Les techniques d’anesthésie locorégionale peuvent être utilisées, en particulier le bloc para-vertébral qui permet de bloquer les nerfs responsables de l’innervation du sein et de la paroi thoracique. Cette technique spécifique est associée généralement à une anesthésie générale.
Elle est réalisée de préférence avant la chirurgie, après une anesthésie locale de la peau et à l’aide d’un appareil d’échographie qui va permettre une bonne précision du geste.
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Position sous contrôle échographique | Vue échographique du cathéter |
Le contrôle de la douleur est obtenu au contact des nerfs du sein par l’administration d’anesthésiques locaux qui vont apporter un bloc nerveux puissant durant la période post opératoire.
Le médicament antalgique est administré à l’aide d’un cathéter qui va permettre une perfusion continue voire une auto-administration par la patiente à partir d’une pompe externe.
Le dispositif est surveillé par l’infirmière douleur et les infirmières de chirurgie qui enlèvent le cathéter en tirant doucement après avoir enlevé le dispositif de fixation. La durée d’utilisation est variable allant de 2 à 3 Jours selon l’intensité des douleurs ressenties par la patiente.
Cette technique n’est pas une anesthésie péridurale agissant au niveau de la moelle épinière car l’extrémité du cathéter est positionnée d’un seul coté en regard des racines nerveuses qui sont déjà sorties de la colonne vertébrale (schéma).
L’anesthésique local est libéré au contact des nerfs et va bloquer la transmission du message douloureux vers le cerveau. Le produit diffuse largement dans cet espace para-vertébral sur plusieurs niveaux permettant une bonne activité antidouleur du produit couvrant toute la zone opératoire de la poitrine.
Les incidents rencontrés avec cette technique sont peu fréquents essentiellement techniques voire exceptionnellement pulmonaires.
Ses avantages dépassent largement les inconvénients, et on peut citer la qualité de l’analgésie, la diminution des doses de morphine utilisées ainsi que ses effets secondaires comme les nausées, les vomissements et la sédation excessive. La mobilisation de la patiente est possible rapidement ainsi que le premier lever dés le lendemain de la chirurgie après accord du chirurgien. Le retrait des drains est plus facile car souvent totalement indolore. Les autres avantages comprennent une meilleure cicatrisation des tissus et une meilleure prévention de la douleur chronique post-mastectomie.
Cette technique est associée à l’administration d’antalgiques classiques par la bouche. Elle n’est pas obligatoire, néanmoins en cas de refus de la patiente d’autres solutions seront proposées comme une technique régionale avec injection unique ou une Pompe à Morphine.
Références :
Chirurgie du sein, Société Française d’Anesthesie-Réanimation : http://www.sfar.org/acta/dossier/archives/dou06/html/d06_05/dou06_05.htm
Institut UPSA de la Douleur :
http://www.institut-upsa douleur.org/Protected/UserFiles/IgwsIudV5/Resources/Document/Nos_programmes/PROCEDOL/pdf/institut-upsa-douleur-procedol-chirurgie-sein.pdf
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Auteur: Dr Etienne GOUJARD Médecin Anesthésiste Réanimateur
Mise en page: 8 Septembre, 2012
Mise à jour:
15 Août, 2015